Un éveil par rapport aux répercussions de la crise climatique se fait sentir dans la population de façon assez critique depuis les quelques dernières années. Cette prise de conscience collective est sans doute alimentée par la prise de parole de plusieurs activistes environnementaux, mais aussi par des manifestations plus tangibles de cette grande problématique dans notre ère qui suscitent l’idée de l’urgence d’agir. Les arts vivants sont toujours un moteur important de sujets brûlants d’actualité qui se doivent d’être discutés et décortiqués.

Ce sujet particulièrement actuel est le point de départ de la création de la pièce Pétrole de François Archambault, suite à la découverte de l’auteur d’un dossier du New York Times datant d’il y a quarante ans qui faisait déjà alors état de façon assez alarmiste des effets du réchauffement climatique. L’œuvre présentée au Théâtre Duceppe de la Place des Arts met en scène l’histoire de Jarvis Larsen, un scientifique fasciné par l’entomologie qui s’intéresse aussi principalement aux répercussions de l’industrie pétrolière sur l’environnement.
Le récit se pose à la toute fin des années 70 et se penche sur les efforts menés par Larsen et son acolyte Sylvia qui sont tous les deux recrutés par une importante entreprise pétrolière aux États-Unis à titre de consultants en ce qui a trait aux enjeux environnementaux causés par l’industrie du pétrole. Simon Lacroix joue le personnage de Jarvis avec toute l’authenticité et le charme qu’on lui connaît. Olivia Palacci, quant à elle, brille dans le personnage de Sylvia, qu’elle interprète de manière très solide et personnelle.
C’est dans un rythme effréné que l’histoire se déroule durant laquelle on suit le parcours déchirant de ces deux activistes qui se butent à la mauvaise foi mercantile d’une tonne de lobbyistes de l’industrie dont ils dénoncent les actions. On suit en parallèle l’histoire intime de Jarvis qui est marié à une autre activiste du mouvement environnemental qui intègre une coalition indépendante de scientifiques qui se prononcent également contre les activités de l’industrie du pétrole.

La distribution comprend de nombreux comédiens, dont Éric Bernier, Jean-François Casabonne et Elkahna Talbi. Ces derniers se partagent une scène inondée d’une épaisse couche d’eau dans laquelle ils pataugent pendant les 95 minutes de la pièce, sans jamais nommer cet élément. L’eau qui monte et dérange sans qu’on y change quoi que ce soit et sans qu’on reconnaisse la menace qu’elle incarne est une importante partie de la mise en scène signée Édith Patenaude qui sert très bien l’amplitude du propos. Un immense soleil brûlant trône au-dessus des têtes des acteurs tout au long de l’histoire. Tantôt éclatant et menaçant, tantôt éclipsé par une noirceur glaciale, le symbole fort ajoute beaucoup d’impact au thème qui a probablement amplifié ou ravivé le sentiment d’éco-anxiété chez plusieurs spectateurs.
Bien que cette production puisse être source de désespoir et de cynisme face à une problématique connue et laissée pour contre depuis trop longtemps, c’est sans contredit une pièce à voir pour apprécier toute l’intelligence et la finesse de l’écriture de François Archambault et le jeu sans faille des interprètes.