White Out : immersif et insaisissable

Le Festival TransAmériques (FTA), présenté du 24 mai au 8 juin dernier, a été un franc succès pour sa 17e édition et a contribué, avec panache, à annoncer un été montréalais 2023 riche en culture. Avec des dizaines de propositions en théâtre, danse et performances diverses, les organisateurs du FTA ont réussi leur pari encore une fois cette année en faisant briller des œuvres et des créateurs de tous horizons tout en sortant du cadre établi.

Parmi les œuvres composant la programmation du festival, White Out, une création de la compagnie théâtre L’eau du bain, dont Nancy Bussières, Anne-Marie Ouellet et Thomas Sinou sont les fondateurs s’est démarquée par son unicité, combinant une trame sonore et une composition scénographique frappante à un texte tout en poésie. Dans un univers déboussolant et multisensoriel imposé à son auditoire, les créateurs de White Out ont su mettre en scène une expérience théâtrale poétique et complètement hors du commun. La pièce avait d’abord été présentée l’année dernière au Carrefour international de théâtre à Québec et était donc présentée pour une seconde séquence de représentations du 2 au 4 juin dernier au FTA.

Crédit photo : Jonathan Lorange

La chambre, la mer, le vent et les éléments sont choisis par les auteurs comme points d’ancrage pour les interprètes qui tissent devant nous un texte poétique qui est accompagné d’un univers sonore complètement éclaté et d’une fabuleuse scénographie. Les compositions sonores produites sur scène sont juxtaposées à des sons captés dans divers univers extérieurs et organiques. Ils créent une trame sonore qui s’intègre au paysage changeant et vaporeux créé par les tons, la lumière, les textures, la brume. Les effets multidimensionnels des sons, des tons et des jeux de lumière créent une sorte d’état méditatif et portent le spectateur à voir des scènes construites par le biais d’hallucinations.

Inspirée de l’écriture de Marguerite Duras, notamment du classique littéraire La maladie de la mort, White Out produit chez le spectateur un inconfort, un aspect déstabilisant, une quête de compréhension pour évoquer le deuil comme l’ultime perte de repères. On passe par une tempête particulièrement réaliste en ouverture de la pièce, qui cause un réel choc dans la salle, par son intensité en sons et en jeux de lumières et de tons qui amènent un élément immersif complètement déboussolant à des moments de silence et de douceur glaciale. La relation au deuil, au vide et à la noirceur se dessine ensuite à travers le mouvement d’Anne-Marie Ouellet qui interprète le rôle du personnage principal, les mots qui se tissent ensemble lentement et qui raisonnent très fort. Des enfants se joignent ensuite à la partie et agissent comme pointe de lumière à travers la grande pénombre. Ils ravivent l’espoir et ramènent à la vie ce qui semble immuable et perdu.

Crédit photo : Jonathan LorangeLa compagnie théâtrale L’eau du bain présentait également, dans le contexte du FTA, son autre proposition, La chambre des enfants. Ce trio de créateurs est une révélation et sera sans doute à surveiller pour ses prochains projets. On sort de cette expérience comme on quitte une conversation remplie de réflexions envahissantes et de questionnements existentiels. On en sort nourri, un peu chamboulé et, à certains égards, changé.

Laisser un commentaire